Le premier axe est le rapport au savoir. Le numérique a induit un changement du rapport au savoir qui désormais est accessible de manière permanente, mais souvent noyé dans une masse d’informations dans laquelle il est souvent très difficile de se repérer, ce qui pose à la fois le problème de la visibilité de la ressource (moteur de recherche) mais également celui de la distinction entre le savoir savant et profane (recommandation, jugement sur la fiabilité de la source, stratégie de recherche etc.). Du côté des détenteurs traditionnels du savoir, le numérique a provoqué une perte du monopole qui induit des remises en question de l’autorité (management, enseignement etc.) mais aussi de nouvelles formes d’expression ou d’appropriation. Le numérique induit également de nouvelles formes de « consommation » du savoir avec un passage de l’écrit, essentiellement le livre, à des contenus multimédia sur un écran et un sentiment grandissant que détenir le savoir soit même n’est plus aussi indispensable. Cela se traduit par une externalisation de la mémoire (inutile de le retenir, c’est sur internet), un excès de confiance dans les outils numériques dont on maîtrise mal le processus de traitement.
Stiegler, B.(2014) Technologies numériques et la transformation du savoir